Pour comprendre les limites du rescrit du crédit d'impôt recherche, il faut garder à l’esprit son principe fondamental. Pour bénéficier des garanties de cette procédure, la situation doit être restée strictement identique à celle sur laquelle l’administration avait pris position.
Le rescrit crédit d'impôt recherche confronté à la définition de la R&D
Dès l’éligibilité technique du projet, l’entreprise doit être très précise et doit anticiper dans son dossier de rescrit l’ensemble des opérations de R&D jusqu’à la fin de l’année civile présentée.
Or, la R&D repose sur plusieurs caractéristiques : la nouveauté, la créativité, l'incertitude, la systématique, la reproductibilité et la transférabilité. Nous ne manquerons pas de remarquer que l’incertitude est le propre d’une activité de recherche et développement : les travaux doivent revêtir un caractère incertain quant au résultat final.
Il convient donc de se poser la question suivante : Comment anticiper les travaux et leurs résultats alors même que l’incertitude est le propre de la R&D ?
Limite au rescrit CIR par l’extrapolation hasardeuse des dépenses R&D
Dans le cadre d’un rescrit CIR, qui intervient au plus tard six mois avant la date limite de dépôt de la déclaration de CIR, il est impossible de faire une évaluation juste et précise du montant de crédit d'impôt recherche. Ceci est simplement dû au fait que le projet de R&D est toujours en cours et que l’année civile relative au calcul du crédit d'impôt recherche est, elle aussi, toujours en cours.
A titre d’exemple, il ne sera pas possible d’évaluer définitivement les frais de personnel puisque le suivi des temps ne sera pas complet. De même, un projet produisant des résultats inespérés peut amener la société à revoir la priorité d’un projet en augmentant les investissements sur ce projet, ou diminuant les dépenses octroyées aux autres projets. Ces événements modifient l’assiette des dépenses et nous comprenons aisément que le rescrit porte uniquement sur l’éligibilité du projet de R&D et ouvre donc la possibilité à l’administration fiscale d’effectuer un contrôle fiscal sur la déclaration de CIR.
Un rescrit fiscal limité par sa date de dépôt
Pour réduire la problématique d’anticipation de la description des travaux, l’entreprise peut réaliser une demande de rescrit en fin d’année civile et avant sa déclaration de CIR. Elle ne respecte donc pas la règle des six mois avant le dépôt du crédit d'impôt recherche. Dans ces conditions, l’administration fiscale n’est pas tenue de se prononcer dans les trois mois suivant le dépôt de la demande.
Par conséquent, si on extrapole la situation, une entreprise peut de bonne foi déposer une demande de rescrit avant la déclaration de son CIR, puis ne jamais recevoir de réponse de l’administration fiscale. Elle ne peut alors pas profiter des avantages du rescrit fiscal et s’expose à un contrôle fiscal au même titre que l’entreprise qui n’a pas réalisé de rescrit fiscal.
Une demande qui ne peut être qu’unique
Enfin, une entreprise ne peut pas déposer un second rescrit fiscal pour un même projet. Il n’est donc pas possible de déposer un deuxième rescrit suite à un refus de l’éligibilité. De même, l’entreprise n’a plus la possibilité de déclarer son CIR sur la base du projet présenté dans le rescrit.
En conclusion, il faut manier le rescrit fiscal avec beaucoup de précautions pour en faire le meilleur usage. Il s’agit d’un outil formidable pour la maîtrise des risques, mais qui peut être à double tranchant. En effet, il est important de comprendre que le Livre des Procédures Fiscales ne prévoit pas de voies de recours dans le cadre du rejet de la demande de rescrit. Au contraire, une vérification comptable représente un réel échange entre le contribuable et l’administration fiscale.